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Livres # Saint-Nazaire

De part et d’autre des rives

L’association Auteur, lecteurs dans la ville invite le public à une rencontre privilégiée avec Marie Richeux autour de son roman “Climats de France”.

Tout commence en 2009 par un voyage à Alger. Marie Richeux découvre la cité Climat de France. Un énorme ensemble architectural construit sur les hauteurs de la ville blanche en pleine Guerre d’indépendance de l’Algérie. C’est le choc, l’auteure et femme de radio est submergée d’émotion devant la magnificence déchue de cette ville dans la ville, ses escaliers escaladant la colline, sa gigantesque place aux deux cents colonnes de pierres de Provence.

Mais le plus troublant est ce sentiment de connu, comme une réminiscence d’espaces et de lumières, que dégage pour elle ce lieu. Un endroit qui fut en son temps symbole d’une utopie de justice sociale et d’un possible vivre-ensemble. Finalement, il ne reste que décrépitude et misère.

La jeune femme apprend que Climat de France a été construit par l’architecte-urbaniste Fernand Pouillon. C’était une commande du maire de l’époque, Jacques Chevallier, pour le relogement décent, dans 5 000 appartements, de familles s’entassant dans les bidonvilles d’Alger. Or, Marie Richeux a grandi à la résidence du Parc de Meudon-la-Forêt, dessinée par le même architecte. Cette résidence a été inaugurée en 1961, et édifiée pour loger les ouvriers algériens venus travailler sur les chaînes des 4L et R8 Renault de Billancourt* et les “rapatriés” fuyant l’Algérie. Si Marie Richeux n’a pas de lien direct avec cette histoire, elle ressent intimement que « la pierre qui pleure a traversé les années ».

Un roman aux multiples climats

Climats de France (on notera ici le pluriel) est un roman mosaïque aux récits qui croisent les lieux, les temps et les exils : il y a les voix singulières du vieux Malek, de la narratrice Marie, et des deux amis bâtisseurs Fernand Pouillon et Jacques Chevallier. Les bâtiments de pierre de Fontvieille ont absorbé la guerre, le sang, la violence, les déracinements, les pertes, les chants de deuil ou l’ignorance joyeuse de leurs habitants si étrangement réunis par le chaos de l’Histoire et l’idéalisme d’un architecte pas comme les autres.

Ce roman délicat tresse des éclats de vie. Comme cette lumière dont on ne sait plus si elle émane du ciel algérien ou des larges baies vitrées de ces cités qui se voulaient “cités du bonheur”. Un roman « qui essaie de ne pas laisser tranquille le silence ».
Encore une belle rencontre littéraire en perspective.

* Un autre ensemble, celui du “Point-du-Jour”, fut également édifié sur les berges de Seine de Billancourt.