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Cinéma # Cinéville

[zoom] Woman at War

(Islande 2018) conte politique de Benedikt Erlingsson avec Halldora Geirhardsdottir, Davíd Thór Jónsson, Magnús Trygvason Eliassen. Durée : 1h41.

Note de la rédaction :

Chef de chœur et écologiste paisible qui se déplace à vélo dans les rues de Reykjavik, Hella mène une vie tranquille dans son petit chez-elle où les portraits de Gandhi et Mandela accompagnent ses soirées solitaires. Sans enfant à l’approche de la cinquantaine, elle mène des démarches pour l’adoption d’une petite fille orpheline de guerre ukrainienne. C’est pourtant la même femme (magnifiquement interprétée par Benedikt Erlingsson, qui joue aussi sa sœur jumelle Asa) qui se cache derrière celle que les autorités et les médias surnomment “la femme de la montagne”, cette activiste terroriste sans peur qui attaque les lignes à haute tension pour neutraliser l’usine d’aluminium qui veut ouvrir son marché à la Chine.

Hella n’hésite pas à arpenter les collines désertes et glacées, et à attaquer les pylônes électriques qui grésillent dans les zones les plus sauvages de son pays. Avec la force inaltérable d’un David face à Goliath, elle arme son arc et fait tomber les géants d’acier au service d’une industrialisation à outrance. Sa connaissance de la steppe islandaise lui fait échapper aux hélicoptères de l’armée et elle descend les drones comme on écraserait un moustique. Il y a un côté aussi ridicule qu’héroïque dans ce combat physique, presque au corps à corps, entre une femme et du métal, une femme et des courants électriques, au milieu de rien, juste la nature toujours prête à la protéger.

Les immensités vierges islandaises sont très présentes au cinéma ces dernières années – et nous ne nous en plaindrons pas –, comme l’expression de notre angoisse face au futur de notre planète. Le réalisateur Halldora Geirhardsdottir met ici à mal ce refuge en terre intacte. Aucun territoire n’échappe à la destruction, aucune mousse, aucune pierre, aucun ciel. Dans ce combat, Hella risque sa vie, sa liberté, et surtout l’annulation de son adoption. Et nous, spectateurs, que sommes-nous prêts à risquer ?

Woman at War n’est pourtant pas un pamphlet et Halldora Geirhardsdottir un donneur de leçons. Loin de là : il réinvente le film militant dans une saga venue de la plus lointaine tradition islandaise, une histoire pleine de vitalité, qui n’hésite pas à mêler humour, truculence, suspens, aventure. Le tout rythmé par un trio de jazz et un groupe de chanteuses ukrainiennes en costumes qui viennent de manière surréaliste nous rappeler que cela n’est qu’une fable moderne… Du cinéma ?

Avis à chaud d’un spectateur
« Une manière décalée d’aborder le thème de l’écologie, avec beaucoup d’humour et une prise de recul bienvenue. » (Jocelyn, 43 ans)