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[zoom] Patients

(France 2017) comédie dramatique de Grand Corps Malade et Mehdi Idir avec Pablo Pauly, Sofiane Guerrab.
Durée : 1h50.

Note de la rédaction :

Des voix, des bouts de phrases, des visages en contre-plongées, un plafond, une rampe de néons agressifs. Les plans s’élargissent, s’allongent en même temps que le champ de vision de Ben. Ses parents lui parlent, un kiné se présente. Ben, 20 ans, basketteur, futur professeur de sport, ne peut plus bouger que son orteil. De jeune homme espiègle qui faisait l’idiot en plongeant dans une piscine sans vérifier sa profondeur, il se retrouve “tétraplégique incomplet au centre de réadaptation de Coubert, en Seine-et-Marne. Et il ne sait pas encore à quel point le chemin sera long, immensément long, et qu’il devra faire preuve d’une inimaginable “patience“.

En adaptant son roman autobiographique éponyme (paru en 2012), Fabien Marsaud, alias Grand Corps Malade*, nous fait un beau cadeau. Connaissant son histoire et le magnifique poète slameur qu’il est devenu, nous, spectateurs, ne vivons pas le “supplice“ de Ben (Pablo Pauly) comme un désespoir, mais comme un chemin vers un “happy end“, et notre regard, nettoyé de trop d’affect, peut s’attarder sur l’essentiel du vécu de ces jeunes gens qui vivent la plus dure des épreuves dans un temps qui n’est plus le nôtre.

Patients raconte d’abord l’immobilité et la dépendance, pour se nourrir, pour se laver, téléphoner, faire ses besoins car « quand tu es dépendant des autres pour le moindre geste, il faut être pote avec la grande aiguille de l’horloge ». Entouré de ses copains d’infortune Farid, Toussaint, Samia, Lamine, Steeve…, Ben nous enferme dans son nouveau “chez lui“, là où durant une année complète il devra réapprendre à bouger une main, puis l’autre, à manier son fauteuil roulant, à se tenir debout sans s’évanouir ou chuter, quand la pudeur des émotions remplace l’impudeur inévitable des corps. Nous le suivons pas à pas, au rythme de ses progrès, de sa fatigue, de ses échecs, de sa force aussi, puisée dans son humour et dans la communauté solidaire que forment ces garçons et filles. Patients nous offre de très beaux portraits d’une humanité que nous oublions derrière les murs des hôpitaux et des centres de rééducation, que nous croisons sur les trottoirs en ne remarquant que les fauteuils roulants. Il nous montre à voir des êtres arrêtés dans leur élan, qui se battent, parfois seulement pour pouvoir tenir une fourchette, parfois pour rien, mais qui continuent à vouloir vivre.

Patients est un film grave qui n’évite pas le patior (souffrir, en latin), mais qui nous montre à voir avec une immense délicatesse un lieu presque hors du monde où la chaleur humaine est comme exaltée parce que :

« Evidemment, on marche sur un fil,
chaque destin est bancal,
Et l’existence est fragile
comme une vertèbre cervicale. »

*Avec Mehdi Idir, réalisateur de ses clips.

Avis à chaud d’un spectateur
« Superbe ! Aussi drôle que dur. Une réussite, surtout pour un premier film. C’est un sacré bonhomme ce Grand Corps Malade. » (Louis, 22 ans)