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Le clown contemporain trace une voie hors piste

Très souvent encore associé au cirque, le clown s’en est pourtant émancipé depuis la fin des années 60 pour mener une carrière hors piste.

Dans l’imaginaire populaire, le clown est excessif, autant dans son maquillage que dans ses habits.

Le clown est issu de la lignée du cirque et avant, de celle des fous du roi, de la commedia dell’arte, puis des bouffons du théâtre élisabéthain. Au cirque, il apparaît au 18e siècle en Angleterre. Il en devient l’un des symboles pendant plus de deux siècles. Star populaire incarnée en France par les Zavatta ou Fratellini vers 1950, il finit par être enfermé dans le rôle d’amuseur d’enfants. A la fin des années 1960, cet art ancestral sort des chapiteaux pour investir d’autres espaces et retrouver sa liberté. Le clown contemporain, également appelé nouveau clown, est né.

Casser les codes

À cette époque, Jacques Lecoq commence à casser certains codes, longtemps considérés comme immuables. Il le débarrasse de son maquillage, de ses habits excessifs et simplifie son jeu. Il le fait exister de nouveau sur une scène de théâtre. Aujourd’hui, ce « poète en action », comme le définit Henry Miller, n’a plus grand chose à voir avec ses illustres devanciers et ses membres ne s’identifient plus systématiquement par une exaltation colorée de leur appendice nasal.

« Conscient des failles qui hantent les hommes depuis qu’ils sont capables de rire d’eux-mêmes, le clown contemporain est un maître de l’éviscération des sentiments », souligne Pascal Jacob, entre autres directeur artistique du cirque Phénix.

Beaucoup d’artistes citent Blanche Gardin comme l’une des leurs dans sa façon de faire sauter les verrous. Pour son confrère nazairien Fernand Jourdain, elle est « un clown verbeux, plutôt dans le registre du burlesque ». Comme certains de ses contemporains, elle surfe sur une forme de dangerosité ou d’inquiétude sous-jacente qui tranche avec évidence sur la douceur présumée du personnage.  « Le clown contemporain a fait du public son territoire de jeu le plus extrême et parfois sa victime », poursuit Pascal Jacob, pour qui le clown endosse aussi une mission sociale. D’ailleurs il franchit régulièrement le quatrième mur pour provoquer le rire par tous les moyens. Car, comme l’indique encore Pascal Jacob dans la présentation de son dernier ouvrage Clowns ! : « Aujourd’hui, de la scène à la piste, de la rue à l’hôpital, féminin, social ou politique, le clown est partout ! »

* Clowns ! de Pascal Jacob, coédition Seuil et BNF, 2021, 45 €.

Lire « Fernand Jourdain : le clown, une autre manière d’être ensemble ».