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Livres # Saint-Nazaire

Flonflons, de Gérard Lambert

Après “Dernier chapitre”, retour sans concession sur son rapport à la littérature et ses vingt ans de libraire à Saint-Nazaire, Gérard Lambert sort un nouveau récit comme un long poème épique.

Flonflons s’ouvre sur une épigraphe de Jean-Yves Le Bellec, chanteur poète nazairien d’adoption trop tôt disparu en avril 2020 : « Si la vie est tirée, qu’on la boive debout ». Un hommage à un ami, une offrande au sens profond de la camaraderie portée par Chico, Pierrot, Dorée, Evariste, Marion, Gilles, la petite Eva, Guillemette… Autant de personnages aux itinéraires chaotiques et aux caractères bien trempés chez qui le lecteur croit reconnaître certaines figures nazairiennes. Avec un pôle central, le café-restaurant Par ici la bonne soupe, un endroit comme il n’en existe plus beaucoup à Saint-Nazaire, où on gratte la guitare, on boit, on mange des assiettes consistantes, on chante, on danse, on refait le monde, on s’engueule, on se confie parfois, on s’étouffe de rire, on s’aime, on pleure. Et autour, la ville et son « côté mal rasé » avec ses « cœurs tapants, ses bistros fanés et ses mains solides », où « des mecs à gueules de prolos cassés se mettent à citer Nietzsche au détour d’un ballon de rouge ».

Flonflons a l’humour d’une chanson canaille, la chaleur d’un zinc quand la tempête gifle les rues tirées au cordeau, le souffle des résistances ouvrières, la solidité des solidarités, le déchirement d’une expiration d’accordéon, la poésie de la truculence populaire. Il y a un peu des Tontons flingueurs là-dedans, un peu de Jehan Rictus aussi, dans ses Soliloques du pauvre, la résignation en moins et des coups de griffes en plus.

Gérard Lambert nous offre aujourd’hui une lecture où les phrases se donnent à mâcher tant elles sont savoureuses et une magnifique déclaration d’amour à la culture ouvrière, là où les sentiments les plus forts s’expriment avec la plus grande pudeur, derrière les joyeux et bruyants flonflons.