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Lecture de vacances : “Taba-Taba”

Du haut de la terrasse du 37 bis de la rue des Pics des Courgs Blancs, la vue est dégagée sur le fond de la vallée du Louron. Je referme Taba-Taba de Patrick Deville. Les vacances ne sont pas finies.

Lire Taba-Taba a été un moment d’agacement et de plaisir frénétique. Un peu comme une grosse pelote de ficelles emmêlées. On s’énerve, on s’agace, on râle. Mais au fur et à mesure que la ficelle se déroule proprement devant soi, que le dévidage se fait, on se dit que la victoire se rapproche.

Ca y est, je viens de recoller les morceaux de l’hypermnésique, l’auteur, avec ceux de l’amnésique, ce soldat inconnu qu’est Taba-Taba. Je viens aussi de faire un long voyage, des portes du lazaret de Mindin (Loire Inférieure) à Madagascar ; j’ai suivi les colonnes de l’exode du nord au sud de la France ; et que sais-je encore. Le fil à suivre est un peu, non, très, compliqué ! Et pourtant, je ne peux m’empêcher de le suivre. Je reconnais ici et là des traces de mes propres voyages. Les souvenirs remontent ; on s’y arrête ; on repart. C’est fatigant et fascinant à la fois.

L’auteur ne veut rien dire de ses propres sentiments. Mais je ne peux m’empêcher d’y penser. Je me dis que cet homme est peut être fou, en tout cas très souffrant. Sa mémoire l’encombre, il la traine à travers le monde, il nous épuise s’il ne s’y épuise lui-même. Il a besoin d’écrire ce livre pour s’en débarrasser. Je ne suis pas certain que cela suffira.

Voilà, c’est un point de vue.

PS) Je me dis qu’un homme qui a les mêmes égards pour sa voiture qu’autrefois le voyageur pour son cheval, ne peut pas être un mauvais homme.

Pierrot

Archive Estuaire n° 1447 « Un livre pour effleurer le temps ».