Retour à l'agenda
Spectacles # Saint-Nazaire

“Je voudrais travailler encore”

De l'empêchement peut naître la solidarité, comme celle des structures du territoire qui soutiennent comme elles le peuvent les artistes locaux.
Pour exemple : Quai des Arts, à Pornichet, et la Cie théâtrale Arts Symbiose.

La Cie Arts Symbiose essaie toujours de tourner simultanément un spectacle pour plateau comme celui sur la découverte de son corps par un tout-petit, Grandir, et un autre à promener partout, tel le parcours sensoriel et écologique Huumm… des légumes !, « pour aller à la rencontre d’autres publics, dans les écoles, les zones rurales, j’aime ces formes autonomes », explique Karine Le May, comédienne et metteuse en scène. La compagnie devait répéter son nouveau spectacle pour plateau cet été, une pièce pour jeune public d’Hervé Blutsc, Méhari et Adrien, mais difficile de se projeter quand les théâtres sont en train de jongler avec d’éventuelles (re)programmations. De là le désir de création d’un spectacle qui puisse entrer dans les écoles et les crèches, « seuls endroits qui nous sont encore autorisés ».

Karine Le May avait bien un idée dans les tiroirs, une création sur les émotions, mais où travailler ? Elle a donc spécialement savouré sa chance de retrouver l’atmosphère si particulière d’un théâtre sans les lumières de la nuit et l’intensité des répétitions d’un nouveau spectacle, même si ce n’était que pour une semaine, du 19 au 26 janvier.
« Au mois de décembre, je me suis sentie m’éteindre. Il fallait réagir, c’était vital, l’essence de ce que je suis commençait à être atteinte. Rien n’était vraiment prévu, mais j’avais eu la chance de rencontrer Laurence Colin* lors du premier confinement, quand les artistes du territoire** ont décidé de se rencontrer pour réfléchir ensemble. Je tiens d’ailleurs à souligner que cette crise que nous traversons tous aura au moins eu un effet positif : la solidarité entre artistes. Laurence est comédienne et sophrologue, c’était la personne parfaite pour imaginer avec moi ce nouveau spectacle. Le projet a mûri et j’ai appelé Gérard Boucard (NDLR : le directeur artistique de Quai des Arts), qui m’a répondu de suite OK », raconte la comédienne.

« Nous sommes complètement perdus, reprend Gérard Boucard. Après des reports et des reports de reports de spectacles, nous n’avons plus aucune visibilité, nous ne voyons rien de l’avenir. La seule chose que Quai des Arts puisse faire, c’est soutenir au maximum les équipes artistiques. Alors, nous en accueillons le plus possible, pas forcément comme d’habitude bien sûr, car nous n’avons pas de moyens supplémentaires pour cela, mais nous leur mettons à disposition le lieu et les techniciens. »

Cette semaine s’est donc passée – trop vite – entre improvisations, écriture et mises en jeu à partir d’images poétiques ou clownesques. « Au départ, tout est blanc, même mon costume, tout est neutre. Arrive un bouchon de lait, bleu, il devient bateau, tempête intérieure, mes pieds se transforment en marionnettes. Chaque surprise s’ouvre sur une autre surprise et chaque émotion apporte une nouvelle couleur. Nous construisons pas à pas un parcours initiatique émotionnel, et c’est là que la présence de Laurence est essentielle, elle apporte son éclairage sur la justesse de ces émotions », s’enthousiasme Karine Le May. « Je suis à cheval entre le regard extérieur et la mise en scène, le miroir dans lequel Karine peut s’enrichir, un peu comme un flacon d’épices », explique Laurence Colin, quand Jean-Luc Rivière, compagnon de route et de création, participe au processus créatif en posant son regard sur l’écriture gestuelle.

Un spectacle encore sans nom qui pourra rencontrer son public de crèches en maternelles et pour lequel Arts Symbiose a déjà des pistes de ventes bien que « tout dépende de la conjoncture à venir qui peut empirer, il faudra peut-être le mettre aussi dans une boîte ».

En attendant, le plaisir de travailler est bien présent, reçu presque comme un cadeau… Tout comme l’a été celui de la Cie Nina La gaine qui sort d’une résidence au Théâtre de Saint-Nazaire où, avec Céline Lamanda et Régis Langlais, Stéphanie Zanlorenzi a répété Le Minot***, une déambulation sensible pour une marionnette et un musicien.

* Laurence Colin, comédienne et metteuse en scène, a créé la Cie nazairienne Rouge Sardine.
** Voir notre article du 16 avril 2020 : “L’inquiétude des artistes du territoire (et d’ailleurs)”.
*** Voir notre article du 15 décembre 2020, “Le Minot”.

Laurence Colin avec un masque Quai des Arts.

///// “Un théâtre est un lieu de vie” /////

« Un spectacle est une communion entre artistes et public. Quand nous avons rouvert cet automne, on ne voyait de la scène que des masques, bleus et blancs, les rires étaient étouffés et on n’entendait plus la respiration de la salle. Nous avons eu l’idée de faire fabriquer des masques lavables UNS1 sombres, de bonne respirabilité et aux élastiques réglages. Et le plus : avec une photo de spectacle imprimé dessus. Il en existe de six spectacles au choix, qui représentent la diversité des arts vivants accueillis à Quai des Arts. Nous en avons vendu 160 en quatre spectacles seulement. Dans le même esprit, les flacons de gel sont posés sur des pieds de batterie. L’idée était de recevoir le public avec le moins d’angoisse possible, un théâtre est un lieu d’imagination, de vie, de plaisir. » (Gérard Boucard, directeur artistique de Quai des Arts)
Les masques sont en vente à 3,70 €.
Les personnes intéressées peuvent prendre rendez-vous auprès de la billetterie : 02 28 55 99 43.