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Portraits # Saint-Nazaire

Les coups de foudre de Léonie Bischoff

Expo, rencontre, visite, lecture dessinée en direct…
Gros coup de projecteur sur Léonie Bischoff qui sera présente, les 25 et 26 novembre, à Saint-Nazaire pour l’acte 1 du premier focus belge mis en scène par une collaboration à cinq têtes*. L’occasion de découvrir l’univers singulier de cette bédéiste auréolée du prix des lecteurs d’Angoulême.

Après la galère, les fins de mois difficiles…, le luxe ! « Le luxe de pouvoir fonctionner aux coups de cœur », dit celle qui, le prix 2020 des lecteurs d’Angoulême en poche pour Anaïs Nin, sur la mer des mensonges, ne cache pas sa « peur de [s’] embourgeoiser » face à ce succès grandissant et ô combien « perturbant » qui lui est tombé dessus sans qu’elle ne s’y attende forcément : «  Pour moi, c’est un coup de bol. Certes, j’ai travaillé. Beaucoup. Mais je peine encore à me dire que je le mérite. Je me sens un peu illégitime », confie la bédéiste suisse, installée à Bruxelles depuis 2003 et publiée chez Casterman. LA maison d’édition. De renommée mondiale. Qui lui donne le champ libre : « Un grand privilège. J’ai une liberté totale. » Liberté de « m’investir, croire, ressentir avec passion, sans la contrainte de rentabilité ». Finie « la roue du hamster ! » qui tournait sans relâche, entre dessins la nuit et jobs alimentaires le jour… A la Fnac comme libraire disquaire et pour Kinder ! « Il fallait réaliser des dessins pour un site destiné aux enfants. Trop genré pour moi. » Son guilty job, « mais ça payait le loyer ! »  

Les débuts chez Casterman 

Sa détermination a fini par porter ses fruits. La jeune diplômée de l’Institut Saint-Luc de Bruxelles se fait remarquer par Casterman en publiant, chez Manolosanctis, Princesse Suplex, l’histoire d’une employée de bureau la semaine, catcheuse le week-end ! La machine est lancée. Léonie Bischoff signe chez Casterman en 2010. En 2013 sort Hoodoo Darlin’ (8 000 exemplaires), un polar empreint de magie vaudou dans le bayou de la Louisiane des années 60. Puis, entre 2014-2018, elle cosigne avec Olivier Bocquet une trilogie adaptée des romans policiers de Camilla Läckberg (20 000 exemplaires chacun). Un premier travail d’équipe : « Un apprentissage ! Je suis plutôt de nature solitaire », raconte Léonie Bischoff qui conçoit généralement ses BD de A à Z…  

La BD, « une évidence » 

Dessin, écriture, colorisation, elle fait tout, « toute seule. Peut-être une question d’égo d’artiste ? », s’interroge-t-elle, situant sa démarche « entre l’artisanat et l’artistique. C’est un des rares métiers où l’on peut faire du dessin à l’ancienne avec des crayons et du papier ! »  

Cet héritage, elle le tient de sa famille « modeste » pour qui la culture de l’art, l’imprégnant dans toute son entièreté, s’est transmise de génération en génération : « Mon arrière-grand-mère était peintre sur émail, mon arrière-grand-père restaurateur d’art et mon père bijoutier. Chez nous, l’art, tout le monde le pratique ». Et Léonie, depuis toute petite. « J’ai toujours aimé les livres, lire, dessiner. En fait, toute ma vie s’est nourrie, se nourrit de ce que j’ai fait, je fais sur ma table à dessin ». La BD ? Une évidence « avec le recul ». 

Anaïs Nin, « ma muse » 

Anaïs Nin, sur la mer des mensonges © Léonie Bischoff,
avec l’aimable autorisation des éditions Casterman. 

 

Le fait est, Léonie Bischoff s’est fait un nom dans le 9e art. Et le succès rencontré par Anaïs Nin, sur la mer des mensonges le confirme d’autant plus. Cinq traductions,  116 000 exemplaires… tous quasi épuisés ! Cet album biographique fictionnel paru en 2020 a séduit Angoulême, « le festival de Cannes de la BD ! ». Et tout un public enchanté d’avoir fait connaissance avec cette écrivaine franco-américaine à la vie sulfureuse, pionnière de la littérature érotique dans les années 30. « Anaïs Nin, c’est ma muse, un vrai coup de foudre… Depuis longtemps, je la lis. Elle m’a toujours accompagnée dans ma démarche artistique. Elle me donnait l’envie de créer. Certes, je n’adhère pas à toutes ses réflexions, mais sur certains points, on se ressemble ! » Dans ses journaux intimes, « des vrais œuvres d’art », Anaïs aborde la soumission orchestrée par l’homme dans les mondes politique et artistique, la quête de liberté personnelle et sexuelle, l’avortement… « Anaïs ne se disait pas féministe, contrairement à moi. Et comme elle, je ne me revendique pas militante, au sens classique du terme. Même si, à travers mes livres, j’ai l’impression de militer », souligne l’illustratrice pour qui les valeurs d’égalité, de justice, d’humanité, bien ancrées en elle, s’expriment au travers de ses personnages réels. Ou fictifs, à l’instar de Simon dans La longue marche des dindes, l’aventure d’un orphelin de 12 ans chargé de convoyer 1 000 dindes à travers l’Ouest américain, à l’époque du Far West. Son 7e album et premier dans la catégorie jeunesse paru cette année. 

Colères féminines 

Pour le prochain, le coup de foudre a eu lieu, mais a l’allure, à ce jour, d’une « grande page blanche. J’ai des envies, des notes accumulées depuis plusieurs années, des émotions, des images, des colères féminines, de la tristesse que je n’arrive pas encore à exprimer ». Mais ça ne saurait tarder, Léonie Bischoff n’est pas du genre à s’endormir, à défaut de lauriers, sur ses crayons ! 

* Premier focus Création belge, de nov. à déc. ; le second en mai. Plusieurs artistes et disciplines « pour mettre en lumière la richesse de la création belge ». Focus initié par Bain public autour d’un multi partenariats avec la médiathèque, L’oiseau tempête, Le Kiosq et L’écrit parle. Chaque lieu créera un événement autour de cette thématique lié à son projet culturel et artistique.  

///// Un week-end avec Léonie Bischoff ///// 

Médiathèque, expo Le dessin à fleur de peau jusqu’au 31 déc.
Librairie L’oiseau tempête, vendredi 25 nov., 18h30, rencontre croisée.
Médiathèque, samedi 26 nov. :
– 15h, visite guidée de l’expo.
– 16h, rencontre-dédicace.
A Bain public, samedi 26 nov., 19h30, lecture dessinée.
Voir détail dans Agenda et Expos.