Marche contre le racisme : 1983-2023, même combat ?
À l'occasion des 40 ans de la marche des Beurs, la Nazairienne Marie-Laure Mahé, une marcheuse de l’époque, raconte… Avant de battre de nouveau et joyeusement le pavé, ce 18 novembre, entre autres animations.

Marie-Laure Mahé (à gauche et en médaillon à droite), membre du Mrap (Mouvement contre le racisme pour l'amitié entre les peuples) et Vincent Rebérioux de la Ligue des droits de l’homme.
Elle avait 21 ans. L’âge des marcheurs, « ils étaient dix » à la toute base, se souvient Marie-Laure Mahé qui a participé à la marche pour l’égalité et contre le racisme ; 1 500 km bras dessus bras dessous avant d’ajouter : « Tous étaient issus des Minguettes. » Un quartier de la banlieue sud de Lyon, là où tout a commencé. C’était en 1983, en octobre 1983. Une époque sous tension, la France est le théâtre d’une série de « crimes racistes ». Quatre mois avant, le 20 juin 1983, Toumi Djaïdja, 19 ans, se faisait tirer dessus par un policier. Les sittings, les grèves de la faim en faveur de la non-violence n’ont pas eu l’effet escompté. Le leader de SOS Avenir Minguettes (bien avant SOS Racisme) décide alors, depuis son lit d’hôpital, de lancer cette marche, avec plusieurs jeunes de la cité et Christian Delorme en tête de cortège, le curé des Minguettes ainsi surnommé. Ni une ni deux, Marie-Laure Mahé les rejoint. Une évidence à ses yeux, avec cette « conviction » profondément ancrée « qu’il fallait être là ». Faire cause commune pour faire société, son leitmotiv : « Pour dire stop aux préjugés, aux incompréhensions, aux haines », lance celle qui est partie de Marseille ce 15 octobre 1983 – ils étaient 17 au total – avant de rejoindre Paris ce 3 décembre où près de 100 000 personnes s’étaient rassemblées ! Une marche – sommairement appelée “la marche des Beurs” –, et un écho retentissant… François Mitterrand les reçoit à l’Élysée, « une vraie reconnaissance », un changement de regard qui s’opère et des revendications entendues et actées dont, celle majeure, de la carte unique de résidence de 10 ans…
La faire vivre dans les mémoires
Quarante ans et « 88 députés d’extrême-droite » plus tard, « il faut recommencer », lance Vincent Rebérioux de la Ligue des droits de l’homme. Qui avec cinq autres associations [Mouvement contre le racisme pour l’amitié entre les peuples (Mrap), MQ Avalix, Collectif urgence sociale, Femmes solidaires et Les Ami.e.s de May] invite les citoyens, ce 18 novembre, à une déambulation pacifiste et festive de Maison de quartier en Maison de quartier. S’ensuivra la projection le 24 novembre du documentaire de Mogniss Abdallah, Minguettes 83, (MQ d’Avalix, 18h). Cinéma toujours avec La marche, de Nabil ben Yadir, suivie d’un débat avec des acteurs de l’époque, le 16 novembre (Cinéville, 19h30). Et « pour faire vivre cette marche dans les mémoires » et l’inscrire dans le roman national, une grande exposition se tiendra jusqu’au 24 novembre. Alors, regardons-la, marchons, et agissons. Et pas les uns contre les autres !
/// Programme
• Samedi 18 novembre, déambulation, à vélo ou à pied : Bouletterie (13h30, la genèse de la marche), Chesnaie (14h20, les revendications de la marche), Avalix (15h15, lecture des doléances / chants avec le Fol atelier), Petit caporal (16h, chanson avec Cavamania batacada), Prézégat (17h, “40 ans après la marche, où en sommes nous dans les quartiers ?”/ danse avec les Ghetto twins).
• Exposition nationale sur la marche visible aux MQ Avalix, Immaculée, Chesnaie, jusqu’au 24 novembre.
• Cinéma : La marche, de Nabil ben Yadir, suivie d’un débat avec des acteurs de l’époque, le 16 novembre, Cinéville, 19h30, tarifs : 7,80 €, 5,50 €. Minguettes 83, documentaire de Mogniss Abdallah, le 24 novembre, MQ Avalix, 18h, gratuit.