Power up ou les mondes engloutis
Le Grand Café accueille jusqu’au 12 mai Power up, imaginaires techniques et utopies sociales… Pour une immersion dans l’univers abyssal des infrastructures énergétiques, à l’heure où l’urgence climatique est l’affaire de tous.

TheSpaceDiscoisanUnderground
©BMagdy
Power up, c’est un projet collectif d’une dizaine d’artistes, déployé simultanément au Grand Café à Saint-Nazaire et à la Kunsthalle à Mulhouse. Power up, c’est « un objet audacieux, hybride », souligne Sophie Legrandjacques, directrice et commissaire des expositions du Grand Café, à l’initiative de cette exposition, avec Géraldine Gourbe, philosophe, critique et commissaire d’art et Fanny Lopez, historienne de l’architecture et des techniques. Power up, c’est le regard de femmes qui se pose, s’empare de la question des infrastructures énergétiques, sous les feux des projecteurs ! Power up, c’est l’histoire d’un monde englouti, invisible, souterrain. Qui renvoie à un monde matriciel interconnecté. Qui « organise nos modes d’existence », pense et régit nos biens communs. Un monde enfoui. On l’entend certes, l’imagine, le devine, le fantasme… pour le concevoir autrement, aujourd’hui, pleinement conscient de la gravité de la crise écologique. « L’histoire du progrès est une histoire qui se raconte », et pas forcément, uniquement « par la voix de l’ingénierie, mais par le regard aussi de non-experts qui porte de nouvelles perspectives, entre imaginaires plastiques, récits spéculatifs, utopies visuelles et architectures conceptuelles ». Ouvrons alors la porte du Centre d’art contemporain, et parcourons ce cheminement réflexif et artistique qui nous plonge dans les entrailles de la « culture technique ». Avec Touch Sanitation, l’artiste Laderman Ukeles met en lumière, par la photographie, les invisibilisés de New York.
L’objectif pointé sur ces éboueurs de l’ombre, sans lesquels la ville ne pourrait tourner. Un cliché, et une lettre adressée à chacun d’eux, qui font face à un alignement de moquettes d’égout, un objet improbable signé Laura Lamiel. Un Regard détourné « avec malice » qui interagit avec Intranquility de Tatania Trouvé. L’artiste nous invite alors à pénétrer, par le regard, dans un intérieur ordonné, envahi par des objets menaçants. Dans l’autre salle du bas, tout à côté, le château d’eau imaginé par l’architecte nazairien Jacques Dommée, au début des années 1940. En hommage au fleuve sauvage qu’est la Loire. Un objet utopique qui n’a jamais vu le jour. « Une sorte de vigie à l’échelle des buildings new-yorkais », qui répond à la carte de Charlotte Vinouze. Un univers XXL, climato-cosmique, sur les infrastructures énergétiques du territoire nazairien, situé non loin de la Ligne de lumières (sensible) de Véronique Joumard qui « s’anime et vibre » selon l’activité environnante, et les bains douches des dockers, les Wet men (Hommes trempés) de Lou Masduraud.
Marthe Barbance, l’icône pop’ de Saint-Nazaire ?
En haut des marches, le superbe dessin de Maya Mihindou qui célèbre, révèle, telle une Madone, la Nazairienne d’adoption Marthe Barbance (1902-1929), alias Marthe La Géante, dont la thèse La ville, le port, le travail sortie en 1948 reste à ce jour « le plus précieux des jalons historiques de l’histoire nazairienne ». Le visiteur pourra repartir avec une reproduction, « un poster à afficher au mur de sa chambre. Pour que Marthe devienne une icône populaire ! », lance l’artiste, sur le point de présenter sa fresque monumentale, un fourmillement d’idées, de connexions, irisé et inspiré par le concept de pétromasculinité… Puis direction El Qamar, fiction d’une communauté imaginée en Palestine par Marielle Chabal, ou le Soleil de lune de Jean Picart Le Doux (1902-1982), artiste peintre et tapissier français du renouveau de la tapisserie contemporaine, parmi d’autres œuvres à contempler avec… énergie !
/// au programme ///
• Visite commentée, tous les samedis, 16h.
• Une heure, une œuvre, à la découverte des tapisseries de Jean Picart Le Doux, jeudi 7 mars, 18h30, gratuit.
• Visite contée avec l’association Fabelo, samedi 23 mars, 11h, gratuit. Pour les 5/10 ans.
• Projection de films du Centre national des arts plastiques avec un critique d’art, mercredi 3 avril, 20h30, cinéma Tati, tarifs Ciné.
• “Les relations entre architecture, décolonisation et pratiques écologiques dans la France d’après-guerre”, avec Paul Bouet et Maya Mihindou, mardi 9 avril, 18h30, Bain public, gratuit.