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[zoom] Les invisibles

(France 2019) comédie de Louis-Julien Petit avec Audrey Lamy, Corinne Masiero, Noémie Lvovsky, Déborah Lukumuena.
Durée : 1h40.

Note de la rédaction :

7h59. Elles sont nombreuses à attendre devant le portail. Les unes discutent haut et fort, les autres, visages fermés, se tiennent silencieuses. Toutes sont encombrées de sacs plastiques et de cabas. 

8h. Le portail s’ouvre. Les femmes s’engouffrent à l’intérieur, accueillies par les travailleuses sociales qui distribuent bons de douche et café. Nous sommes au centre d’accueil de jour l’Envol et nous ne saurons pas où elles ont passé la nuit : foyer de nuit fermé au petit matin, squat, parking souterrain, bouche de métro ou encoignure de hall d’immeuble. Dans le réconfort de la chaleur et de la sécurité, les langues se délient, entre frictions, apathie et éclats de rire. La routine de vies sans d’autre perspective que celle de ne pas succomber. Mais cet emploi du temps malgré tout rassurant va voler en éclat quand l’administration décide de fermer le centre pour manque de résultats de réintégration satisfaisants. Au premier rang du front, directrice, assistante sociale et éducatrice décident de braver les procédures, suivies par ces femmes qui vont retrouver le meilleur d’elles-mêmes. 

Après son Discount, Louis-Julien Petit continue de diriger sa caméra vers les visages de ces personnes qui gênent le paysage social, ici des femmes de la rue encore plus invisibles que ne le sont les hommes. Les travailleuses sociales y sont interprétées par des comédiennes professionnelles (Audrey Lamy, Corinne Masiero, Noémie Lvovsky), les femmes sans abris par des comédiennes rencontrées dans des centres d’accueil et dont l’histoire a directement nourri le scénario. Les premières sont bien abîmées par la bagarre que nécessitent leur travail et leur vie personnelle pas toujours reluisante. Les autres sont fracassées par les drames et leurs conditions d’existence. Des femmes ordinaires rendues extraordinaires par leur lutte quotidienne contre l’injustice, les violences, le froid et la solitude. Ensemble, elles construisent un film bourré d’humanité et de délicatesse. 

Ni documentaire, ni drame, ni comédie… Difficile de classer Les Invisibles. Et c’est tant mieux. Engagé, sensible, révoltant, émouvant, cru, drôle, il est là pour rebattre les cartes de nos regards. 

Avis à chaud d’un spectateur
« Extra, j’ai beaucoup ri et ma gorge s’est souvent serrée. Rien de plombant, c’est un film vivifiant malgré tout, qui dit que des choses sont possibles, qu’il faut ouvrir sa tête et ses yeux. » Carole, 29 ans 

Lire notre interview de Louis-Julien Petit et Audrey Lamy en rubrique « Portraits ».