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Liberté, égalité, LGBT ? Qui soutient la communauté ?

Au-delà des parades festives et revendicatives que sont les Gays Prides, qu’existe-t-il en matière d’aide, d’actions et d’écoute pour la communauté LGBT+ de Saint-Nazaire et environs ?

Un jeudi à l’Agora, Marc, Kévin et Aël attendent les participants du GEP*. Ces bénévoles de Contact 44 reçoivent toute personne qui se sent concernée par l’homosexualité, la bisexualité ou la transidentité. Impossible pour eux de savoir combien ils seront ce soir, ni qui ils seront. C’est le principe de ces rencontres bi-mestrielles, anonymes, libres et gratuites. « Parfois, nous sommes 15. Parfois, personne », confie Marc. Quant au profil des participant.e.s, il est à l’image de la société : « des jeunes, des parents, des personnes d’âge mûre, toute catégorie socio-professionnelle ». Il n’existe pas de profil type. Et même si l’association se caractérise par « sa connotation familiale, l’idée est de tendre la main à celles et ceux qui en ont besoin », poursuit Aël. Ici, pas d’ordre du jour, on y vient pour parler de ses problèmes, de ses questionnements, partager son expérience. « Chacun et Chacune peuvent témoigner, dans un climat de confiance, d’écoute, en toute confidentialité » comme à Queer’Amann ou dans le collectif Respectez-nous. 

 

  

Ne pas rester seul.e 

Kévin d’ailleurs aurait aimé que l’antenne locale de Contact 44 existe pour accompagner ses parents quand il leur a annoncé son homosexualité. Elise**. aussi s’est retrouvée bien seule. D’où son collectif Respectez-nous, « anarchiste, féministe, contre toutes formes de discrimination », qui propose notamment des « apéros lesbiennes, bi, pan… en toute intimité ». « Quand je suis revenue de Toulouse, où la communauté LGBT+ est bien structurée, j’ai halluciné de voir qu’il n’y avait rien ici. » Le seul lieu LGBT+, le Betty’s bar, ayant tombé le rideau. « Quand on est homo, bi… ici, on a le sentiment d’être la seule ! », déplore Elise. Et le manque est encore plus criant pour les personnes trans. Un constat que partagent les bénévoles de Contact 44 qui doivent les orienter sur l’antenne de Nantes car ils ne sont pour le moment ni assez nombreux, ni formés localement, alors que « la transidentité est un sujet qui monte ». Elise reprend, « on est pourtant nombreux. On l’a vu à la dernière Gay Pride, jeune et festive avec beaucoup de personnes différentes ». Une énergie qui la rend optimiste : « on est au début de quelque chose. » Reste qu’elle préfère garder l’anonymat car dans l’agglo, « le monde du travail demeure très stigmatisant et hétéronormé ». On est bien en 2022 ? 

* groupe de d’écoute et de paroles.
** Prénom d’emprunt afin de préserver l’anonymat. 

« Le dégré d’homophobie reste élevé » 

 

Organisateur de la pride, Queer’Amann est une association d’entraide
et d’écoute entre personnes LGBTQIA+. 

Estuaire : Quel est l’objet de l’association Queer’Amann ? A qui s’adresse-t-elle ?
Queer’Amann : Nous sommes une association d’entre-aide collégiale LGBTQIA+*, elle s’adresse à toutes les personnes concernées. Nos activités vont de l’organisation de groupes de discussion physiques ou virtuels pour les personnes LGBTQIA+ de la région à l’entraide administrative en passant par l’organisation d’événements tels que la Pride 2022. 

13 % des jeunes ne se sentent ni homme ni femme, ils revendiquent une neutralité de genre, cela atteste d’une société en évolution, moins régie par les genres et plus respectueuse de la singularité de l’individu. Est-ce que ça veut dire que ces revendications infusent dans la société, notamment auprès des plus jeunes ?
Il y a toujours eu des personnes ne se reconnaissant pas dans les normes de genre existantes, ce qui a changé c’est la possibilité d’avoir accès plus facilement à une information de qualité, ce qui permet à plus de personnes de mettre des mots sur qui iels sont vraiment. L’exemple des jeunes est sur-médiatisé, mais c’est quelque chose qui touche toutes les générations sans distinction d’âge – et tant mieux, il n’est jamais trop tard pour se découvrir tel.le qu’on est. 

Quel regard portez-vous sur les polémiques qu’ont suscitées l’apparition du pronom “iel » dans le dictionnaire du Robert ?
Elle est malheureusement représentative d’une séquence médiatique bien rodée, dans laquelle quelque chose d’innocent (ici un dictionnaire faisant son travail, qui est de rapporter les usages existants) est déformé et exploité par des personnalités politiques pour créer de l’outrage artificiel, faire parler d’elleux et entretenir leur audience dans l’impression (fausse) d’être une minorité assiégée. Finalement, ce genre de séquence trumpiste ne bénéficie qu’à l’extrême droite mais cause des torts bien réels aux personnes qui en sont la cible. 

  

 

Quel constat tirez-vous sur les discriminations envers les personnes LGBTQIA+ ?
Même si les choses s’améliorent un peu, il reste beaucoup de choses à accomplir : les violences chirurgicales envers les personnes intersexes continuent, les personnes trans n’ont toujours pas accès à la PMA, les protocoles français d’accès à la transition pour les personnes trans sont très obsolètes, pour les seniors LGBT+ les problèmes liés à la solitude, l’homophobie ou la sérophobie dans les EHPAD sont nombreux… De manière plus générale, le degré d’homophobie/transphobie, etc. dans la société française reste élevé, surtout en cette période d’incertitudes (climatique, sanitaire, économique) où elle est largement nourrie, amplifiée et exploitée par des personnalités politiques ou des médias cherchant à faire du buzz. 

Vous préparez la prochaine Pride à Saint-Nazaire, quel message souhaitez-vous portez à cette occasion ?
Ce ne sont pas les sujets de revendication qui manquent. Mais le choix du mot d’ordre principal de cette édition 2022 n’est pas encore acté. 

Propos recueillis sous forme de questions écrites par la rédaction Estuaire

* LGBTQIAP+ : Lesbiennes, Gays, Bi·e·s, Trans, Queers, Intersexes, Asexuel·le·s, Aromantiques, Pansexuel·le·s…