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Le Parc de Brière : un territoire sous fortes pressions

Entre préservation de la biodiversité et contraintes liées à l’activité humaine, et face aux enjeux du changement climatique, le Parc naturel régional de Brière cherche à faire évoluer sa doctrine. Entretien avec Bruno Daval, directeur.

Estuaire : Comment se porte aujourd’hui le Parc naturel régional de Brière ?

Bruno Daval, directeur du Parc naturel régional de Brière.

Bruno Daval : Nous sommes sur un territoire en évolution avec une pression importante. Nous sommes une grande zone humide qui doit faire face à 3 éléments importants : la pression des espèces invasives, la pression démographique car le territoire attire beaucoup de population et le changement climatique. Ces trois effets combinés entraînent un risque de perte de la biodiversité.

A propos des effets climatiques, les changements sont-ils déjà perceptibles ? Quelles conséquences ?

C’est un de nos axes importants de travail. Nous devons renforcer nos travaux sur les effets du changement climatique car nous avons encore peu de données. On va subir des évolutions du régime hydrique avec des hivers davantage pluvieux et des étés plus secs, les marais devront faire face à un niveau de la mer qui monte (ndlr, ils ne sont qu’à quelques mètres au-dessus). C’est un enjeu très important à moyen et long termes. Pour le moment, les effets du changement climatique ne sont pas encore perceptibles mais nous devons nous y préparer. Cela va provoquer des évolutions très fortes des milieux naturels. Nous avons déjà adopté un principe de réduction des gaz à effet de serre.

La région attire toujours plus d’habitants. Comment gérez-vous cet équilibre précaire entre préservation de la biodiversité et urbanisation ?

Nous avons des orientations très fortes à ce sujet dans la charte du Parc contre l’étalement urbain. La limitation de l’urbanisation est axée sur les bourgs, les hameaux y sont fermés. Les différents documents comme les Scot (ndlr, le schéma de cohérence territoriale) ou les Plu (ndrl, plan local d’urbanisme) des communes adhérentes au Parc ont repris ses orientations afin de limiter l’urbanisation éparse. Nous sommes dans l’objectif de zéro artificialisation des terres. Nous sommes un laboratoire de l’urbanisation de demain : répondre aux besoins de logement tout en le maîtrisant. Déjà, en limitant la consommation d’espace, nous avons permis de faire revenir des espaces naturels au sein même des bourgs.

Une grande partie de l’activité économique de la Brière repose sur l’agriculture…

En effet, le Parc a développé le projet alimentaire du territoire qui repose sur deux dynamiques. L’une, ancienne, est l’élevage et la gestion du marais qu’on accompagne avec une labellisation et des pratiques agro-environnementales. L’autre est axée sur l’alimentaire du territoire par une diversification des productions, comme le maraîchage dont le marché de Kerhinet est la vitrine. Si l’agriculture peut se révéler une contrainte, nous avons mis en place des outils d’accompagnement sur les bonnes pratiques. Nous n’avons pas de réglementation contrainte. On veut convaincre : faire passer un message positif.

Vous avez lancé les Atlas de la biodiversité communale, dits les ABC ? Quels sont leurs objectifs ?

Nous connaissons parfaitement la zone historique du marais, comme le Grand Marais Mottière. Mais nous avons une connaissance éparse de la biodiversité sur les communes limitrophes. Les ABC permettent d’identifier et inventorier les espèces domestiques et sauvages au-delà des espèces remarquables. C’est avant tout de la connaissance et un outil qui permettra de mieux gérer ces espaces et de travailler sur les aménagements futurs.

Dans la dynamique des ABC, vous avez organisé depuis septembre un cycle de conférences sur la biodiversité ?

Nous apportons de la connaissance afin de sensibiliser les acteurs publics et les habitants à la préservation de la biodiversité et surtout à leur faire connaître leur environnement naturel. Nous avons choisi de faire découvrir ces petites bêtes qu’on n’aime pas, qui nous dérangent et qui sont historiquement décriées. On veut leur apporter un autre regard sur les araignées ou les nuisibles.

En cherchant à impliquer le public dans la connaissance du Parc, n’est-ce pas une manière de rendre le citoyen plus actif dans sa gestion.

Nous ne voulons pas que le Parc soit seulement une question de syndicat mixte. On veut que l’ensemble de la société s’implique plus fortement, la faire participer aux choix de demain. Nous avons mis en place des ateliers de réflexion sur différentes communes comme le site de Bel Air à Trignac. Nous ne venons pas avec un projet clé en main. Ce sont les habitants qui décideront de ce qu’il adviendra. A travers les ateliers de Skol Ar Mor qui construit des chalands en bois aux méthodes traditionnelles – il n’existe plus aujourd’hui de fabricants de chalands en bois – c’est un partage de culture que nous mettons en avant. Nous voulons qu’il y ait une appropriation de cette culture par les habitants.

Construction de chalands en bois dans les ateliers de Skol Ar Mor.

La charte du Parc court jusqu’en 2026, avez-vous déjà les premières orientations pour la prochaine charte ?

Nous devons construire une doctrine face aux enjeux qui nous attendent à moyen et long termes : sur le changement climatique, la zéro artificialisation des terres et la participation citoyenne.

Le Parc va-t-il accueillir encore d’autres territoires actuellement en périphérie ?

La question du périmètre est ouverte. La question peut se poser pour le bassin versant du Brivet. Mais il est important de garder une cohérence de territoire de zone humide.