Retour à l'agenda
Livres # Saint-Nazaire

“Les chemins de traverse” ou l’histoire d’une amitié à travers le temps

Dans son premier roman* publié aux Presses du Midi, Arlette Gélabert décortique l'histoire d’une amitié de près de quarante ans qui prend fin sur une terrasse de café parisien.

Louise et Clément se connaissent depuis l’adolescence. Lui est « orphelin de cœur, doublement abandonné d’abord par son père, puis par sa mère » submergée par les difficultés de sa vie de mère célibataire. C’est auprès de sa femme Solène qu’il a trouvé refuge, une épouse castratrice, symbole de la femme nourricière, avec qui il tente de construire la famille qu’il n’a pas eue. C’est un père exemplaire et un mari aimant, qui a abandonné ses idéaux de jeunesse pour une vie rangée.

Elle, la narratrice, est son contraire. Happée par l’amour, le travail, les copains, l’amitié, elle a brûlé la chandelle par les deux bouts, portant en bandoulière sa devise « Brassens et sa Non-demande en mariage ». Et, malgré sa bienveillance, c’est un regard acide qu’elle pose sur la famille de son ami. Cette amitié va pourtant exploser en plein vol lorsque Elodie, la fille aînée de Clément, va révéler son homosexualité à ses parents lors d’un déjeuner en amenant sa petite amie du moment. Ils désapprouvent. C’en est trop pour Louise. Elle ne comprend plus cet ami qui dans le passé avait toujours été tourné vers les autres, tant qu’elle se moquait souvent de son empathie pour tous les laissés-pour-compte de la vie. Le thème de l’homosexualité n’est pas au centre du récit, il se justifie comme un élément déclencheur pour raconter les souffrances et les blessures d’ego.

Arlette Gélabert nous plonge dans un roman construit comme une pièce de théâtre intimiste. A chaque acte, son lieu, son dialogue et son événement, présent et passé. Le lecteur est invité à explorer furtivement le hors-scène, cet espace où se déroulent ou sont censés se dérouler des événements en dehors du champ de perception du public.

La plume est vive, incisive, tissant acte après acte le récit d’une relation qui s’anémie au fil de la vie.

* Arlette Gélabert vit en région nazairienne. Elle avait autoédité en 2019 une dystopie en deux tomes, Ils rêvaient d’un autre monde, qui plongeait le lecteur dans les années 2040 après la “Grande catastrophe” qui avait ravagé le monde et vu naître des régimes totalitaires. (Archive Estuaire novembre 2019).