[zoom] Winter Brothers
(Danemark 2018) drame de Hlynur Palmason avec Elliott Crosset Hove, Lars Mikkelsen, Peter Plaugborg. Durée : 1h34.
Des coups de masse assourdissants, les flashs lumineux de lampes frontales, chaos dans les ténèbres des entrailles de la terre où des hommes que l’on devine tranchent avec violence des veines de plâtre. Le hurlement d’une sirène. Les mineurs retrouvent l’air sous un ciel aussi opaque que les masques larvaires du
carnaval de Bâle qui recouvrent leurs visages. La forêt environnante est poudrée de neige, seule la monstrueuse carrière découpe ses lignes sombres sur la blancheur livide.
Emil (le lunaire Elliott Crosset Hove) vit et travaille avec son frère Johan (Simon Sears). Grand échalas décalé, Emil passe son temps entre la mine, ses fantasmes militaires, l’alcool frelaté qu’il fabrique avec des produits toxiques volés dans les réserves de l’usine et qu’il revend à ses collègues (en en ingurgitant une bonne dose au passage). Et la contemplation de la fenêtre de la belle Anna. Le temps s’étire goutte à goutte, sans volume, jusqu’au jour où son breuvage empoisonne un homme et où il surprend son frère avec Anna.
Le plasticien islandais Hlynur Palmason filme ses personnages comme des figures humaines emprisonnées dans un décor de théâtre, dans lequel Emil serait un Laurel sans Hardy qui contemple un monde incompréhensible en cherchant une échappée au châtiment de Sisyphe, la beauté sculpturale de son frère n’étant que le miroir de leur fragilité.
Winter Brothers est un objet angoissant. Les pulsations immersives de sa bande-son contredisant sa plastique glacée. On peut se laisser porter par cette atmosphère esthétique et étrange, ou refuser ce voyage dont l’intrigue qui revendique son manque d’importance serait une photographie de la tragédie humaine.
Avis à chaud d’un spectateur
« Je ne sais pas. » (Arnaud, 52 ans).