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Cinéma # Ciné Malouine # Salle Jacques-Tati

[zoom] The Old Oak

(Royaume-Uni 2023) drame de Ken Loach avec Dave Turner, Ebla Mari.
1h53.

Note de la rédaction :

À 86 ans, Ken Loach compte parmi les cinéastes les plus titrés du 7e art ! À son compteur, 34 films, 15 sélections cannoises et 2 Palmes d’or avec le bouleversant Moi, Daniel Black (2016) et Le vent se lève (2006), un énième chef-d’œuvre, sombre, historiquement et politiquement engagé. Engagé…, le 2e prénom du réalisateur britannique, lui qui mieux que personne plante sa caméra là où trop peu n’osent se fourvoyer, dans ces faubourgs dickensiens où précaires et malmenés plient les genoux – ravages de l’ultra-libéralisme ; lui qui pointe sa caméra là où trop peu n’osent la diriger, sur ces visages abîmés, boursouflés, déshumanisés – symptômes de l’ère thatchérienne. Poing levé, Ken Loach délivre un cinéma militant, un cinéma d’un réalisme social traversé d’humanisme, jamais misérabiliste, toujours pertinent, rarement frontal, sans fioriture ni grand discours… Un cinéma à visage humain qui décrit, avec une tendresse qui prend aux tripes, la vie de ces gens ordinaires noyés dans les eaux tourmentées du quotidien – drame ô combien shakespearien. Avec toujours cette lumière au bout du tunnel, toujours… La caméra de Ken Loach rend justice contre l’injustice, rend justice à ces “mis de côté” embourbés dans la boue de l’indifférence et qui, malgré ce poids sur leurs épaules, savent relever la tête, et la sortir de l’eau – abattus mais combatifs, à terre mais jamais résignés. La dignité, l’un des sujets de prédilection du cinéaste, avec le chômage, la pauvreté, le sort des immigrés, la solidarité, l’entraide entre les communautés désœuvrées, le cœur même de The Old Oak. Le nom du pub tenu par le charismatique et touchant JT Ballantyne, « qui rime avec choukran », merci en arabe… The Old Oak, l’agora, l’ultime « chêne » à palabre de ce village du nord de l’Angleterre où la misère fait rage, depuis la fermeture dans les années 80 des mines de charbon ; où les stigmates des grèves matées par l’intraitable Dame de fer restent vivaces, profondément ancrés dans les esprits meurtris. Alors quand ces ouvriers, le coude au comptoir à refaire le monde, voient des réfugiés syriens débarquer sur leur terre… Imaginez… Tombereau d’insultes en guise de bienvenue !, et j’en passe et des terribles. Le schéma classique, la peur de l’autre, le rejet, l’ignorance qui ne connaît pas, qui ne connaît rien, et qu’il est bon d’éclairer – un grand pas pour l’Humanité ! JT et la jeune Syrienne Yara, son appareil photo en bandoulière, vont s’y atteler, contre vents et marées… Tâche difficile que celle de vouloir distiller la paix entre deux mondes en souffrance, diamétralement opposés. Opposés que l’on croit… « Puissent tous les hommes se souvenir qu’ils sont frères ! », citait Voltaire dans le Traité sur la tolérance, publié en… 1763 ! À méditer, et ce n’est pas Ken Loach qui vous dira le contraire ! Les contraires s’attirent. Qu’ils ne se tirent plus dessus, et le monde sera meilleur…