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Cinéma # Ciné Donges

[zoom] Priscilla

(États-Unis 2023) drame de Sofia Coppola avec Cailee Spaeny, Jacob Elordi, Dagmara Dominczyk.
1h53.

Note de la rédaction :

D’ennui, il est souvent question dans le cinéma de Sofia Coppola ! Que l’on soit à Tokyo (Lost in translation), à Los Angeles (Somewhere), à Détroit (The Virgin Suicides), l’ennui s’invite, s’infiltre, s’introduit plus ou moins tortueusement dans le quotidien de ses personnages, d’aucuns devenus iconiques. À la cour des rois, aussi, l’ennui fait montre de courtoisie, et d’autant plus quand il s’adresse à celles qui portent la couronne… De tout son poids ! 

La punkette Marie-Antoinette de Coppola s’ennuyait avec son roi ; la soumise Priscilla Beaulieu, avec son King, ne dérogeait pas à la règle ! À Versailles ou à Graceland, c’est du pareil au même. Derrière le faste, la folie, l’extravagance, l’opulence ; la solitude, l’ennui, l’effacement. Dans ces cages dorées, le néant. Pour Priscilla, l’attente interminable. Des heures, des jours, des mois sans le voir, à espérer. Confinée. À tourner en rond. Désenchantée. 

Elle qui, à 14 ans, tombait dans les bras de son prince charmant, de 10 ans son aîné ! Une ado sensible, vulnérable qui croyait encore aux contes de fées, éprise et sous emprise, qui n’avait d’yeux que pour lui, docile. Elvis, en tout manipulateur narcissique qui se respecte – du moins c’est ainsi qu’il est dépeint par son ex-femme, productrice exécutive du film –, en profitera pour la façonner à son image, physiquement et psychologiquement. L’apprivoiser ! Objet de tous ses désirs, l’infidèle mari fera de cette jolie petite poupée une enfant-trophée, sans personnalité, conservée dans sa virginité, l’obsession de Presley, une parmi tant d’autres. Pas convaincue qu’aujourd’hui, vu le contexte actuel, le roi du rock’n’roll passerait entre les mailles du filet du mouvement #MeToo. 

De cet ennui constant, de cette monotonie quotidienne, Priscilla finira par s’en libérer. Quant à nous, on la suivra, de façon linéaire, dans cette émancipation, pris entre plusieurs sentiments assez aléatoires. Car en filmant l’ennui, le risque est de taille. Celui peut-être de nous offrir un voyage au bout de… l’ennui !