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Cinéma # Salle Jacques-Tati

[zoom] Daaaaaali !

(France 2024) comédie dramatique de Quentin Dupieux avec Anaïs Demoustier, Gilles Lellouche, Edouard Baer.
1h18.

Note de la rédaction :

Daaaaaali ! Le titre du dernier Dupieux aurait aussi pu s’écrire au pluriel. Édouard Baer, Jonathan Cohen, Gilles Lellouche, Pio Marmaï, Didier Flamand et Boris Gillot, ils ne sont pas moins de six acteurs, interchangeables, pour incarner l’artiste excentrique le plus célèbre de l’art moderne. Et ils auraient pu être encore plus nombreux. Tant le peintre surréaliste est insaisissable. Tant il a de facettes. Tant il est mégalo. Pas facile de s’y retrouver dans ce portrait qui n’en est pas un. Dans cette interview qui n’en est pas une. Dans cette rencontre imaginée par une journaliste qui n’en est pas une non plus. Boulangère ou pharmacienne reconvertie. Peu importe. On ne sait pas. On ne sait plus. Pour réaliser un film sur le génie catalan, on ne pouvait pas imaginer mieux que Dupieux. Mêmes horizons barrés et baroques. Mêmes univers déjantés et absurdes. Où sommes-nous ? Où se situe la réalité ? Nulle part sans doute. Le spectateur reste suspendu à l’interprétation incroyable des acteurs, et particulièrement à celle d’Édouard Baer et de Jonathan Cohen qui incarnent le peintre à la perfection avec les jeux de regard du maître et cette diction si caractéristiques. Pourtant le propos n’a rien d’un biopic habituel. On est chez Dupieux. Rappelons-le. 

Le réalisateur s’amuse des caprices de la star de la peinture comme de son narcissisme, de ses paradoxes et contradictions qui eux, pour le coup, ne sont pas éloignés de la réalité. Reste que Dupieux nous promène tel Don Quichotte dans les chemins de traverse d’une histoire absurde avec l’Espagne pour toile de fond. Il opère des allers-retours incessants dans l’onirisme, dans un espace-temps surréaliste où les événements font du sur-place ou reviennent en arrière… Le temps est distordu, à l’image des tableaux et de l’univers du peintre, grand connaisseur des théories freudiennes. Le Dalí d’Édouard Baer, qui arrive dans un hôtel pour rencontrer la néo journaliste Judith Rochant (Anaïs Demoustier), met ainsi plusieurs minutes à parcourir un couloir d’une vingtaine de mètres depuis la sortie de l’ascenseur. Mais là où le pari de Quentin Dupieux est réussi, c’est que son long métrage donne l’impression de plonger dans l’une des œuvres de Dalí. Voire dans la vie rêvée de Dalí qui n’aurait pu, non plus, rêver meilleur hommage à son art et à son personnage. Un personnage qui lui-même jouait son rôle. Voilà la boucle bouclée.