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Cinéma # Ciné Malouine

[zoom] La salle des profs

(Allemagne 2024) drame de İlker Çatak avec Leonie Benesch, Michael Klammer, Rafael Stachowiak.
1h39.

Note de la rédaction :

Attention profs sous pression. Spectateurs aussi. Dès les premières minutes du film du réalisateur allemand Ilker Çatak, tout le monde se tend. À l’image de cette jeune prof de maths, Carla Nowak (Leonie Benesch). Femme d’emblée filmée au bord de la crise de nerfs. Yeux embrumés. Regards désapprobateurs envers collègues et équipe pédagogique. Ils sont ceux qui jugent, juge elle-même l’idéaliste intègre qui se pose en pourfendeuse des injustices. Témoin d’une accusation arbitraire dans son collège dit “progressiste”, elle décide de mener sa propre enquête comme un problème de mathématiques qu’elle aurait à résoudre. Une démarche qui déclenche suspicion générale et crises en cascade. 

D’entrée de jeu donc, la tension est à son acmé. Et ne redescend pas. Jamais. Elle est puissante comme la musique qui claque. Lancinante, récurrente. Comme celle d’un métronome ou de l’orchestre qui s’accorde quand se met en place sa classe. Une drôle de cacophonie en réalité. Une drôle d’ambiance aussi dans ce collège glaçant où les enseignants semblent plus malveillants les uns que les autres. Mais en femme finalement forte, Carla fait face. Malgré les pièges, elle résiste, plie. Va-t-elle rompre ? Ne pas lâcher, conserver toujours à l’esprit le cartésianisme qu’elle enseigne elle-même à ses élèves. Carla garde sa ligne. Droite. Les apparences sont décidément trompeuses. Faux coupable, calomnies, diffamation, espionnage, emballement, jugements approximatifs, voici tous les ingrédients d’un thriller hitchcockien réunis, jusqu’au nom de l’héroïne, clin d’œil à Kim Novak, l’actrice dédoublée de Vertigo (Sueurs froides). 

Mêlée à quelque chose qui lui échappe, au cœur d’un système de délation qu’elle même dénonce, Carla se retrouve pourtant du côté où elle ne veut pas aller. Il y a quelque chose de Kafka ou de Buzzati dans ce qui lui arrive. D’autant que tout part d’un petit rien, d’une série de larcins presqu’anodins… La situation semble déraper face à des parents, des profs, des élèves ligués. Des élèves qui, sous prétexte d’une interview pour le journal du collège, se transforment à leur tour en inquisiteurs pour se faire leur propre opinion déjà toute faite, en fait. Ce très beau huis clos haletant et oppressant mérite amplement sa nomination aux Oscars du meilleur film étranger. La Salle des profs : une vraie claque !