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Expos # Montoir-de-Bretagne

Les 100 incroyables… 100 clichés ni tabou

Francesca Clayton a tiré le portrait, en noir et blanc, de 100 personnes porteuses d’un handicap, visible ou non. La Montoirine, Sandrine Graneau fait partie de ces « 100 incroyables » qui seront exposés dans les rues de Montoir-de-Bretagne. La photographe et la modèle se retrouvent dans l’objectif d’Estuaire. Parce que Different is beautiful 2.0… Very beautiful !

• Sandrine Graneau a écrit un livre, Choc toxique, faut-il avoir peur des protections hygiéniques ?, a créé l’association Dans mes baskets, intervient sur FB et auprès des jeunes pour témoigner de « ce sujet encore trop tabou ».

• Francesca Clayton qui mène le combat de front, se servant de son boîtier comme d’une arme pour « changer le regard de la société sur le handicap. On a tous un rôle à jouer dans l’amélioration de la société. C’est ma façon d’apporter ma pierre à l’édifice ».

« Avant mon amputation, j’étais déjà très fâchée avec mon corps. Alors après, vous imaginez… Ça n’a pas vraiment arrangé les choses. » Et pourtant, Sandrine Graneau, Montoirine, 41 ans, foudroyée en 2019 par le syndrome du choc toxique* a osé. Osé l’impensable. Poser dénudée. « D’ailleurs, je ne sais toujours pas ce qui m’a traversé l’esprit ce jour où j’ai répondu à l’annonce de Francesca ! » Francesca, pour Francesca Clayton, la photographe, 34 ans, née à Bristol en Angleterre, choquée adolescente par « ces regards pesants » posés sur son amie atteinte de paralysie cérébrale, laquelle « m’a fait comprendre que si ces regards me dérangeaient tant, c’était peut-être que moi-même j’avais du mal à accepter son handicap ». Des scènes « qui m’ont révoltée », et cette réflexion longtemps restée dans un coin de sa tête. Puis le déclic. En 2015, naît le projet Different is beautiful. Un premier pas « vers l’acceptation ». Francesca pose son objectif sur 11 femmes mal à l’aise avec leur apparence, 11 corps pétris de complexes, … à sublimer ? « Je ne cherchais pas forcément à réaliser de belles photos. Je tentais, à ma manière, de les aider à reprendre confiance en elles, à se découvrir autrement à travers mon regard, à apprivoiser leur corps, à s’accepter… »  

Exposer le handicap au regard 

De cette photothérapie qui en a révélé plus d’une, la jeune Française d’adoption qui vit « du côté de Pau » en ressort grandie, et bien décidée à poursuivre, le caillou en bandoulière,  sa “mission” : « Celle de montrer ce que d’aucuns n’osent voir, ou seulement du coin de l’œil… La différence. » C’est ainsi que Different is beautiful 2.0 voit le jour. En 2022, avec les séances photo qui ont eu lieu dans 18 villes, en France et en Belgique. La différence ? Ici, il est question de poser un regard sur le handicap, « non pas pour changer le regard, mais pour exposer le handicap au regard ». Une nuance de taille pour Francesca qui tient à ce que cette exposition grand format soit présentée en extérieur, dans l’espace public, au vu de tous. Un parti pris assumé : « Il sera impossible de passer à côté, et de les ignorer. C’est le but, sensibiliser et toucher une partie des gens qui ne le sont pas encore. » Depuis 2023, l’exposition ne cesse de voyager de ville en ville. Après Bordeaux, Marseille, Clermont-Ferrand, au tour de Montoir-de-Bretagne, du 29 mars au 14 avril, puis Paris en juin au parc des Buttes-Chaumont. Un avant-goût des JO ? : « Rien n’est encore signé, mais je me bats pour ! » 

« Si on veut exister, être intégrés, éviter les discriminations,
il faut parfois oser des choses un peu folles, mais tellement belles,
des choses qui ont du sens. Tant qu’on ne vit pas le handicap,
on ne peut pas comprendre.
» Sandrine Graneau. 

« Des guerriers avec des failles » 

Different is beautiful 2.0, c’est pour Francesca « un joli méli-mélo » de 100 portraits, 100 modèles « de tout âge, sexe, origine, milieu professionnel et handicap, visible ou invisible, comme l’endométriose. Des étudiants, des sportifs, des mannequins, des influenceurs, des enfants… », et cette ex-infirmière, mère de trois enfants, Sandrine Graneau qui s’est démenée pour faire venir cette exposition à Montoir-de-Bretagne : « Non pas parce que je fais partie de ces 100 incroyables aux vies et aux parcours tout aussi incroyables ! Non… Jouer les modèles, c’est bien, mais il faut aller jusqu’au bout des choses. C’est frustrant de s’arrêter à la moitié du chemin. Au moins là, la boucle est bouclée », souligne cette grande battante qui, amputée des premières phalanges et des pieds, ne peut marcher plus de 300 mètres par jour, « bien qu’aujourd’hui, j’ai réussi à en faire 900. Mais à quel prix ! » Pour le projet de Francesca, Sandrine ne se met pas de limites, et assume. Elle assume de s’exposer, d’exposer son corps dans les rues de sa ville. « Et j’en suis fière. » Comme elle est fière de s’être prêtée au jeu « même si, sur le moment, j’ai détesté… Le moment, pas les photos ! Elles, elles sont sublimes », sourit-elle. Mais la jeune quadra de mettre un bémol ! : « Derrière ces photos, ces sourires, il y a de la douleur, de la tristesse, des coups de cafard, et un combat à mener au quotidien. Nous sommes des guerriers, mais des guerriers avec des failles. Et ça, il ne faut pas l’oublier. »  

* Une maladie rare et dont le diagnostic est difficile. Le CST est provoqué par l’usage de tampons ou de coupes menstruelles de manière prolongée, ce qui favorise les bactéries. Elle peut être mortelle ou entraîner l’amputation de membres.