[zoom] Babygirl
(États-Unis 2025) thriller de Halina Reijn avec Nicole Kidman, Harris Dickinson, Antonio Banderas.
1h54.

Malaise. Côté pile : celle qui dirige. Côté fesses : celle qui est soumise. Babygirl est l’histoire d’une inversion de pouvoir. Le jour où un stagiaire ambitieux lui susurre un « good girl », la super boss chavire. De femme puissante et brillante, Romy (Nicole Kidman) passe au statut d’animal. De chienne plus exactement. Un motif qui fait d’ailleurs le lien entre l’une des scènes d’ouverture et la fin. Une métaphore un peu grossière pour ce film qui se revendiquerait féministe. Car on se demande de quel côté (aussi) se situe l’actrice et réalisatrice néerlandaise Halina Reijn ? « Le masochisme féminin est le fantasme masculin » fait-elle même dire à Antonio Banderas, l’époux… En quoi, par ailleurs, donner la possibilité à une femme puissante de se soumettre à un homme, de ramener sa sexualité à une sexualité de soumission est-il féministe ? Cet imaginaire érotique hyper patriarcal rappelle le traitement de l’humiliation comme mode de relation sexuelle, clin d’œil explicite à Eyes Wide Shut, et à ce que d’autres réalisateurs ont fait précédemment comme Adrian Lyne avec Liaison fatale… Au siècle dernier.
Voir Nicole Kidman laper du lait dans une soucoupe et ensuite réclamer sa caresse au mec qui lui a ordonné de le boire, est gênant. Comme son visage étrange parce que déformé par la chirurgie esthétique. Cette dimension physique apparaît un peu comme un enjeu scénaristique, une mise en abyme. Celle d’une actrice vieillissante à la poursuite de la jeunesse éternelle et prête à tout pour un film. Y compris s’abandonner dans des scènes embarrassantes qui ont tout de même valu un prix d’interprétation à la dernière Mostra de Venise à Nicole Kidman. Le personnage ou l’actrice, ou les deux à la fois, a bien conscience qu’elle n’est « pas normale ». La vision qu’elle a d’elle-même est d’ailleurs très dégradée et soulignée par sa fille qui lui balance : « Tu as une tête de poisson mort ». Dur. Cet ensemble, allié à un environnement urbain franchement froid, décuple le caractère indéniablement maso de ce rôle de quinqua débridée par la génération Z et l’inquiétant Samuel (Harris Dickinson). Ce jeune mâle dominant débutant à cheval sur le consentement. Encore un concept galvaudé ici. Où est le consentement quand l’amant menace de tout révéler ? Incompréhension. En creux, ce thriller érotique questionne aussi le pouvoir. Les femmes ont-elles les mêmes travers que les hommes une fois arrivées au sommet ? Ouvrent-elles plus l’entreprise aux femmes lorsqu’elles sont aux manettes ? Est-ce le pouvoir qui déforme ou faut-il être intrinsèquement mauvais pour y arriver ? Ces questions restent entières.