[zoom] Le deuxième acte
(France 2024) comédie de Quentin Dupieux avec Léa Seydoux, Louis Garrel, Vincent Lindon, Raphaël Quenard.
1h20.
C’est avec cette classe habituelle et ce cynisme exalté qui font de lui un auteur à part, et de ses films des objets cinématographiques non identifiés, qu’il a foulé le tapis rouge du festival de Cannes où son dernier ovni sur pellicule joyeusement barré a eu l’honneur d’ouvrir le bal ! Une ode profonde et déglinguée au 7e art qui ne fait pas dans la demi-mesure, en ces temps où le monde du cinéma n’en finit pas de s’interroger sur lui-même, et de prendre des coups (bien sentis).
Après Making of, bienvenue dans le monde merveilleux du cinéma de Cédric Kahn, comédie ouvrière en forme d’introspection, voilà que Quentin Dupieux s’y colle aussi ! Différemment, et avec brio. Un (autre) film dans le film qui fait mouche. Le maître de l’absurde signe pour la énième fois (on ne s’en lasse pas) une comédie hautement sarcastique, comme on les aime, un grand moment de bizarrerie caustique, comme à son habitude. Le tout, emmené par un scénario en roue libre (aucune allusion à Rubber !) qui plaira aux amateurs d’humour décalé, sublimé par de burlesques joutes oratoires et qui deviendront certainement anthologiques, et porté par un quatuor d’acteurs de choc : Lindon, Seydoux, Quenard et Garrel, sans oublier le fulgurant (et presque inconnu) Manuel Guillot, inoubliable dans la peau d’un figurant-restaurateur tremblotant.
Un jeu d’acteurs détonant pour un film d’acteurs sur des acteurs qui ne vivent pas un long travelling tranquille ! L’enjeu de ce film qui se joue des frontières entre fiction et réalité, qui dynamite les codes, qui secoue les apparences et préjugés, brouille les pistes, dévoilant ainsi, avec une incisive autodérision, l’envers du décor d’un monde qui donne l’illusion de…, mais qui in fine n’est pas si rose. Relations alambiquées, egos démesurés, narcissisme, fragilité, stress, coups bas, compétition, amour, gloire et échec… Un monde impitoyable qui doit vivre avec son époque, ses mutations, ses scandales, ses censures et ses algorithmes ! À quand le troisième acte ?