Lady… Gaga ou la divine “évidanse”
Gaga… Le cancanement du canard en hébreu ; en français, gâteux ou épris de ; dans le milieu de la danse, un mouvement révolutionnaire inventé par le poète-chorégraphe Ohad Naharin, alias Mister Gaga ! Le maître à danser de notre Lady Gaga nazairienne, Caroline Boussard… Qui, depuis 4 ans, transmet « cet art, ce langage unique » à qui veut se sentir libre…
Il y a plus de 150 professeurs de Gaga certifiés dans le monde entier et 3 en France, dont Caroline Boussard.
« C’est quoi ce truc ? », s’était-elle ce soir-là écriée de l’intérieur, littéralement scotchée à l’écran, comme foudroyée par ce qui se tramait sous ses yeux. Elle venait de tomber « par hasard » sur un reportage consacré à celui qui deviendra « non pas un ami ou une figure paternelle, l’intention est trop forte », mais ni plus ni moins son mentor, son inspiration : le chorégraphe israélien Ohad Naharin, aka Mister Gaga, du nom de cette danse révolutionnaire « qui n’en est pas vraiment une ». Caroline Boussard allait sur ses 22 ans, ou les avait tout juste, et entamait sa dernière année au Conservatoire national supérieur de musique et de danse de Paris où elle fut admise 5 ans plus tôt, là encore “sans vraiment s’y attendre”, la trame de sa vie…, faite de hasards bienheureux et de divines évidences. « J’ai toujours dansé par plaisir, sans réelle aspiration de carrière », et pourtant, le jour où la jeune Nazairienne de 10 ans met la main à la barre, quelque chose de puissant se passe : « C’était tellement naturel, inné que j’avais cette impression de déjà-vécu ! » L’une de ces évidences en ré mineur qui, une fois l’enfant majeure, à maturité, arrivent à point nommé… À l’instar de ce docu sur Arte !
La rencontre amoureuse
Et comme “le bonheur n’arrive jamais seul”, bingo, les semaines qui suivirent la diffusion du documentaire, Ohad Naharin et sa compagnie Batsheva se produisaient à Paris. Le billet en poche, direction le Théâtre de la Ville : « Je n’avais qu’une envie, monter sur scène avec eux ! Je m’y voyais. Je voyais la liberté, la passion, la poésie, la sauvagerie… C’était ça, et rien d’autre. Je comprenais pourquoi je dansais. Ça résonnait en moi. » Un vrai coup de foudre. « Une rencontre amoureuse » qui ne s’est pas achevée sur un bai(s)ser… de rideau ! La même année, en 98, la compagnie junior passe deux semaines dans sa classe. LA classe ! Caroline en profite pour faire savoir à Ohad Naharin son désir d’intégrer la troupe : « Il me sourit, et part ! » Puis il revient, quelques mois plus tard, avec les seniors pour danser l’une de ses nouvelles créations sur la scène parisienne. Sans attendre, Caroline se jette à l’eau, profite de l’occasion (et de l’autorisation du maître) pour “se faufiler” sur scène parmi les danseurs lors des échauffements… Et au bout du 4e jour, ce qui devait arriver arriva !
« Le faire grandir » à Saint-Nazaire
« Ohad s’approche de moi et me demande, finalement tout naturellement, de venir participer à cette belle aventure… » Aventure qui la mènera, dès 99, en Israël où elle vivra 18 ans, et aux quatre coins du globe durant ces 10 années passées « au côté » de l’inventeur de génie du Gaga… Un nom qui ne se prend pas au sérieux, « qui le faisait rire, en plus d’être facilement prononçable à travers le monde ». Une méthode surtout. Née dans les années 90, devenue ultra populaire dans le monde suite à la sortie en 2016 du film électrochoc Mr Gaga. Et enseignée par Caroline en Europe, dans de grandes villes en France et depuis peu à Saint-Nazaire où elle souhaite « le faire grandir ». Sa 4e année ici, et la 1re sous l’aile de La Petite Pièce, un espace de danse contemporaine créé et imaginé par la danseuse professionnelle Vanessa Leprince avec qui Caroline a fait ses premiers pas de danse au Studio 1 à la fin des années 80, et partagé un appart’ à Paris, durant le Conservatoire. Les voilà de nouveau réunies avec quelques projets en commun dans les casiers. Mais pour l’heure, priorité donnée au Gaga, et à ses cours*.
Gaga pour tous
Le Gaga… Plus qu’une méthode, c’est une manière, un vocabulaire, un langage à part. « Un mot choisi avec intelligence, un mot qui percute, qui renvoie à un imaginaire au service d’une qualité du geste. » Une sorte de poésie chorégraphique où, par exemple, l’atypique “fondre vers le sol” se substitue au prosaïque “aller au sol”. Telle une image pour donner une intention au mouvement sans créer de narratif. Sa seule ambition ? « Que chacun prenne du plaisir dans le mouvement, vibre, lâche prise. En général, on ressort de là plus vivant, plus léger, en lien avec son corps. » Un instant, l’instant d’une heure où chacun (car adapté à tous) peut « se sentir libre d’expérimenter sans jugement ». Le seul risque ? D’en devenir grave Gaga !