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Expos # Saint-Nazaire

Quand l’Amérique du Sud s’invite au Grand Café

Trois expositions qui ont en commun les migrations, la mémoire, l’identité culturelle, trois artistes (Nohemí Pérez, Ana Vaz et Joris Héraclite Valenzuela) dans trois salles en simultané. Une première pour le Centre d’art contemporain qui leur ouvre ses grands espaces jusqu’au 5 janvier. Rencontre avec l’un d’entre eux, Joris Héraclite Valenzuela qui “silicone” les cités HLM de Saint-Nazaire…

Diplômé de l’école supérieure des Beaux-Arts de Paris, il y a deux ans, Joris Héraclite Valenzuela a bénéficié d’une résidence à Saint-Nazaire pour réaliser cette exposition inscrite dans le cadre d’un partenariat Jeune création avec le Salon de Montrouge.

« Attention où vous mettez les pieds ! », prévient Joris Héraclite Valenzuela en entrant dans la grande pièce du bas, et plus intimement dans son Animatas, le titre de son exposition. Effectivement, entre les herbes folles qui colonisent les sols et les quelques vases de style chinois éparpillés ici et là, mieux vaut rester sur ses gardes ! Et garder les yeux bien grands ouverts, car des œuvres, il y en a à voir… À commencer par les plus imposantes. Des toiles de 3,40 mètres de haut sur 3,25 de large… ou plutôt des empreintes. « Des empreintes en silicone de la base sous-marine, des prélèvements de certaines façades des HLM d’Avalix… Des sortes de cartes mémoires, de pansements qui témoignent des stigmates et des fissures du temps qui passe, et qui s’imprègnent du vécu, des récits, des mémoires de chacun, des mémoires des lieux. » Et l’artiste trentenaire de confier : « Il s’est passé quelque chose de fort à Avalix. Il m’a rappelé le quartier d’où je suis issu, celui de la Noue à Montreuil ». Tellement fort qu’il a organisé, mi-octobre, un atelier grandeur nature et invité les habitants à venir réaliser eux-mêmes des empreintes de leur bâtiment. Animatas, c’est aussi, d’où ce nom, des sculptures-autels. Des édicules que « l’on retrouve le long des routes et des quartiers populaires du Chili », d’où sa famille paternelle est originaire. Faits de “briques“ et de broc, « ces édifices commémorent des décès tragiques, spontanés ou brutaux qui ont eu lieu sur l’espace public ». 

À l’intérieur, des plantes, majoritairement. Joris Héraclite Valenzuela se souvient que petit, au pays, ses grands-parents de culture mapuche utilisaient « exclusivement » des plantes médicinales pour le soigner. Au mur, accrochés, des panneaux, grands ou moyens formats. Une série de sérigraphies réalisées à partir de photographies Google Earth de paysages urbains végétalisés de Saint-Nazaire, et principalement de palmiers aux formes spectrales, voire fantomatiques.  

De la Colombie au Brésil 

Dans la salle d’à côté, El camino de los sueños (Le chemin des rêves) de Nohemí Pérez. Trois œuvres, trois tableaux, trois paysages de la jungle colombienne, dont une de grande taille, faite de petites scènes dessinées, de charbon de bois pour évoquer l’industrie pétrolière et les nombreux conflits qui ravagent la région du Catatumbo, et de broderies…, tel un acte de réparation. Car pour la petite histoire, lors d’un contrôle aux frontières, l’œuvre a reçu quelques malencontreux coups de couteau par des douaniers qui recherchaient de la drogue.  

À l’étage, confortablement lové dans un gros pouf, le visiteur voit des images défiler… Une route, longue de près de  900 kilomètres qui coupe en deux la forêt amazonienne, la BR-319, tristement surnommée “la route de la honte” construite sous la dictature militaire… Il voit aussi des dessins, quelques-uns sur les 3 000 réalisés par les Waimiri-Atroari, l’un de ces peuples indigènes menacés par la déforestation illégale, survivants de décennies de massacres, de pandémies… Des dessins réalisés au cours de leur première expérience d’alphabétisation entre 1985 et 1986, tirés des archives d’Egydio Schwade dont l’artiste et cinéaste Ana Vaz s’est inspirée pour Apiyemiyekî?, son « essai cinémato-
graphique
», qui signifie Pourquoi ?
« Pourquoi Kamña (« les civilisés ») a-t-il tué Kiña (Waimiri-Atraori) ? Apiyemiyekî ? (Pourquoi ?). » Oui, pourquoi ?
 

  

// les plus 

Visites commentées, tous les samedis, 16h. 

Visite en famille dans le cadre de Saut-de-Mouton, samedi 26 octobre, 11h. 

Visite LSF, dimanche 1er décembre, 15h. 

Rencontre avec Joris Héraclite Valenzuela, dimanche 8 décembre, 15h, en dialogue avec Andréanne Béguin, critique d’art.