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Cinéma # Salle Jacques-Tati

[zoom] Diamant Brut

(France 2024) drame d'Agathe Riedinger avec Malou Khebizi, Idir Azougli, Andréa Bescond.
1h43.

Note de la rédaction :

Liane, 19 ans, est comme on dit dans le sud de la France une “cagole”. Courtement vêtue, juchée sur talons hauts, hyper sexualisée et maquillée, elle vit en périphérie de Fréjus avec sa mère et sa petite sœur. Chez elle tout est toc, clinquant, fake : faux cils, faux ongles, extensions capillaires, lèvres gonflées, seins augmentés… Il ne manque plus que les fessiers que la petite bimbo voudrait plus rebondis et volumineux. Un moyen de séduire pour se sortir de sa condition, de son quotidien sordide, coincé entre une mère maltraitante et absente, et la vie au bord du périphérique. Mais attention, l’habit ne fait pas la nonne. La jeunesse et la féminité exubérante de Liane n’excluent pas l’intelligence. 

Liane veut donc sa revanche sur la vie qui l’amoche et qui rend tout moche. Surtout ne pas suivre le même chemin que sa mère. Et la jeune femme est déterminée à réussir comme à ne pas se laisser marcher dessus. Car malgré son jeune âge, Liane est aussi une femme forte. Pour percer, elle inflige de terribles souffrances à son corps, se met en danger, parfois. Le spectateur tremble alors pour elle quand elle se met à errer la nuit sur les bas-côtés des périph’, fagotée comme une poule de luxe de pacotille. Mais c’est, encore une fois, sans compter le courage de celle qui se rêve en nouvelle Kim Kardashian. Un rêve qui lui paraît à portée de main grâce aux réseaux sociaux et à ce fameux casting qu’elle espère décrocher pour la neuvième saison de l’émission de télé-
réalité Miracle Island

Ce premier long métrage d’Agathe Riedinger, qui a connu les honneurs de la compétition officielle du Festival de Cannes, ne sombre ni dans la morale ni dans le manichéisme. Tous les mecs ne sont pas des salauds et toutes les filles ne sont pas de bienveillantes copines. Jalousie, envie…, ces sentiments sont aussi ceux des “collègues” (encore un régionalisme) de Liane. Dans ce film, le diamant brut est aussi Malou Khebizi. Tout repose sur cette bouillonnante actrice dont la réalisatrice se tient au plus près. Au-delà des apparences, son personnage est bien plus complexe qu’il n’en a l’air, obnubilé par sa volonté de plaire, mais très incertain de son désir sexuel. Il oscille comme le film, entre critique sur l’aspiration à la célébrité et empathie envers une victime de la mode, des réseaux sociaux et des supers productions vendeuses de rêves. Chacun interprétera le message de la réalisatrice qui fait à la fois entrevoir un piège, une aubaine ou une issue de secours. Quand la télé-réalité et la notoriété apparaissent à une gamine comme seuls leviers d’un ascenseur social en panne, comment juger de toute façon ?