Cargo complètement À l’Ouest !
Jusqu’au 28 septembre, le festival photographique invite à sillonner les artères urbaines (et pas que) de la cité portuaire… Une immersion à ciel ouvert entre Bretagne et Etats-Unis. Rencontre avec son créateur, Dominique Gellé.

Nothing to see here, de Ben Zank.
Cargo comme au Commencement
Tout juste à la retraite, Dominique Gellé n’avait alors pas de grands projets en tête. Puis un jour, son ami Claude Nori, avec qui il a fondé les éditions d’art photographique En Vues et la revue Photo Nouvelle, lui lance ces mots : « Mais monte donc ton festival ! ». C’était en 2015, une pensée restée alors à l’état d’idée. Quand, quelques temps plus tard, le directeur d’une entreprise spécialisée dans l’affichage sur mobiliers urbains – « un homme d’images, un peu artiste fou » – lui donne carte blanche pour organiser une exposition pour son anniversaire ! Voyage Ordinaire est né, l’antithèse du grand voyage ! Cinq photographes – dont Charles Fréger, présent sur cette 5e édition – pour illustrer les trajets du quotidien, d’ici et d’ailleurs. Une fois la fête achevée, la question fatidique de « que vais-je faire de ce beau projet ? » s’est posée…
Cargo comme Cité portuaire
Le projet sous le coude, il est allé toquer à la porte de la Ville de Saint-Nazaire. « Pourquoi Saint-Nazaire, allez-vous me dire ? Eh bien, ma grand-mère y tenait un hôtel, mon frère y était médecin, et c’est une cité inspirante, naturellement cinématographique, d’instinct photographique.» De là, l’aventure a commencé… Une première exposition, en 2016, à la galerie des Franciscains, des affiches sur quelques abris bus, et sur la ligne Hélyce.
Cargo comme Covid…
… qui a pointé son nez ! Dominique Gellé s’est mis alors à imaginer, avec la Ville, un parcours photographique urbain, dans cet esprit d’offrir la culture à tous, partout. De démocratiser l’accès à l’art en le plaçant au cœur de l’espace public, à la portée de tous, gratuitement et sans barrières. Il a créé l’association L’art à l’Ouest, constitué une équipe, et ensemble (à trois, maintenant à quatre), ils ont échafaudé le concept Cargo. En 2021, le festival éponyme voyait le jour. Avec en point d’orgue, deux grands principes structurants : créer une alchimie entre espace ouvert et fermé (musée, galerie…), et proposer une thématique forte par an. La première, la mémoire, puis l’architecture, les traversées migratoires (humaines / animales), et cette année…
Cargo comme À l’Ouest
Un clin d’œil anniversaire à l’association presque affublée du même nom, à un détail près. Et une 5e thématique qui se veut à double sens… Par son côté barré, surréaliste, poétique, obsessionnel. Et par son approche géographique, où l’on pense de suite à la conquête de l’Ouest, et près de chez nous, à l’ouest breton. Ainsi est mis en lumière le travail de cinq photographes “complètement à l’ouest !” Charles Fréger propose, à sa manière, un inventaire (45 images grands formats) de portraits de femmes, d’uniformes et de coiffes bretonnes (de la pointe du Finistère au Pays-de-Retz, en passant par la Normandie et l’Alsace). Un vrai travail d’encyclopédie qui touchera sans nul doute un public “de patrimoine”. Quant à Maia Flore, elle va D’îles en Lune, un voyage onirique et raffiné sur les plages et côtes malouines, ponctué des mots décousus de la poétesse Albane Gellé. Et du côté des States, place à Anne Rearick pour une immersion humaniste et documentariste dans l’Amérique profonde, un peu à la manière de Dorothea Lange. Jesper Boot nous livrera une vision plus politique de son pays quand Ben Zank nous fera voyager dans son univers surréaliste, façon Magritte ! Des artistes, confirmés ou en devenir, des pépites que Cargo va dénicher en dehors des circuits.
Cargo comme À la plage
La thématique 2026 ! En attendant, deux jeunes photographes, Émeline Sauser et Esther Donikian, investissent depuis avril et jusqu’à septembre les plages de Saint-Nazaire, « un grand terrain de jeu social, géographique, cartographique et urbanistique », un travail de création à découvrir l’été prochain. Une collecte de photos de plage d’amateurs pour contribuer à l’exposition Tous à la plage est en cours*.
Cargo comme Chimères
Ces chimères qui renvoient au “culte du cargo” présent en Océanie en réaction à la conquête coloniale européenne et sur l’album Histoire de Melody Nelson, de Serge Gainsbourg. Chimères qui évoquent également les rêves de Cargo, le festival, qui se voit bien partir du côté de Méan-Penhoët, dans les nouvelles Halles, et pourquoi pas aller carrément en Amérique latine pour y créer un jumelage avec un festival qui lui ressemble. De qualité et à taille humaine. À l’ouest Cargo ? Pas si sûre !